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EMPLOI & FORMATION PROFESSIONNELLE

ÉTUDE

France Travail, intérim et retour à l'emploi

Quel rôle des acteurs de l’intérim dans l’accompagnement vers le retour à l’emploi et quelle complémentarité avec France Travail ?

 

Dossier réalisé en partenariat avec le CRAPS.

 

Face aux transformations rapides du marché du travail, les entreprises de travail temporaire (ETT) s’imposent comme des acteurs essentiels, qui permettent d’améliorer l’adéquation entre l’offre et demande de travail, réduisant ainsi les difficultés de recrutement dans les différents bassins d’emploi. Le réseau constitué de plus de 10 000 agences implantées sur tout le territoire, assure une proximité qui garantit à la fois une connaissance fine des besoins en compétences des entreprises et des travailleurs disponibles dans chaque bassin d’emploi. Cette expertise du placement et du recrutement positionne les agences de travail temporaire comme partenaires incontournables de France Travail pour favoriser le retour à l'emploi des demandeurs d’emploi et l'insertion des publics les plus fragiles. C’est dans ce contexte que FranceTravail et Prism'emploi, l’organisation professionnelle représentant les professionnels du recrutement et du travail temporaire, ont décidé de renforcer leur coopération avec la signature d’une nouvelle convention-cadre en mars 2025. Ce dossier spécial, à travers le regard d’experts du secteur (France Travail, Adecco, Actual, Adequat, Partnaire) vise à mieux comprendre les enjeux de cette collaboration et le rôle-clé des acteurs de l’intérim pour améliorer la fluidité du marché du travail.

1.  Le marché de l’intérim en France, que faut-il retenir ?

Le secteur de l’intérim en France, est dominé par trois acteurs majeurs internationaux (Adecco, Manpower et Randstad) qui se partagent plus d'un tiers d'un marché de 39,2 milliards d'euros en 2023, mais aussi riche d’un maillage de nombreux acteurs de taille plus réduite, parfaitement insérés dans l’économie des territoires, qui assurent les deux tiers des recrutements d’intérimaires. Le secteur a connu une décennie de très forte croissance jusqu'à atteindre un pic historique en janvier 2022 avec 862 000 équivalents temps plein[1].Aujourd’hui, environ 3% des emplois sont occupés par des travailleurs intérimaires, contre moins de 2,5% dix ans plus tôt. Ces emplois sont aujourd’hui moins précaires, entre autres grâce à la formule du CDI intérimaire qui s’est rapidement développée jusqu’à bénéficier à environ 50 000 salariés. Répondant principalement aux besoins ponctuels en main-d'œuvre dans l'industrie, la construction, le transport / logistique et le commerce, les entreprises de travail temporaire ont considérablement élargi leur périmètre d'action au-delà du simple placement d'intérimaires. Aujourd'hui, la formation constitue un pilier stratégique de leur offre, qui permet de valoriser les parcours professionnels des travailleurs temporaires, d’élargir le vivier demain d’œuvre disponible pour pourvoir les emplois vacants, et ainsi de mieux répondre aux exigences croissantes de qualification des entreprises clientes. Les ETT transforment l'intérim en facilitant l'acquisition de compétences répondant aux évolutions du marché du travail, tout en diversifiant leurs activités vers le recrutement permanent, l'outplacement et le conseil RH, permettant de réduire leur dépendance au climat économique et à un marché fortement cyclique.

2.  Une articulation entre France travail et les Entreprises de Travail Temporaire qui tend à se renforcer en réponse aux enjeux du marché du travail

 

Dans un marché de l’emploi marqué par une pluralité d’acteurs et de dispositifs, la question de l’articulation entre France Travail et les autres acteurs, en particulier les acteurs privés, de l’emploi est centrale. C’est dans cette perspective queFrance Travail et Prism’emploi ont signé, en mars 2025 et sous le haut patronage d’Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du Travail et de l’Emploi, une convention-cadre triennale. Cet accord marque une étape importante dans le renforcement de leur coopération, afin de mieux répondre aux défis du marché du travail et de coordonner leurs actions au service des demandeurs d’emploi et des entreprises

Ce partenariat vise à structurer les actions conjointes autour de quatre axes majeurs. Tout d’abord, il s’agit de renforcer les synergies territoriales en coordonnant mieux les interventions entre les différents réseaux (900 agences France Travail et plus de 10 000 agences d’emploi privées) pour répondre plus efficacement aux besoins spécifiques des entreprises et des demandeurs d’emploi dans les différents bassins d’emploi. Ensuite, l’accord entend agir sur les offres d’emploi difficiles à pourvoir, en particulier dans les secteurs en tension et les métiers émergents, en mobilisant des dispositifs comme les Périodes de Mise en Situation en Milieu Professionnel (PMSMP)– permettant de confirmer des projets professionnels grâce à des situations réelles de travail –, la Méthode de Recrutement par Simulation (MRS) – permettant d’évaluer les compétences des candidats à partir d’exercices pratiques, sans se baser sur le CV – ou encore les Préparations Opérationnelles à l’Emploi Individuelles (POEI) – permettant de former un demandeur d’emploi aux compétences requises pour un poste avant son embauche. Ensuite, ce partenariat vise à favoriser l’insertion des publics prioritaires, notamment les personnes en situation de handicap ou les bénéficiaires du RSA, grâce à une mobilisation conjointe des ressources humaines et des expertises des deux réseaux, en lien avec les autres acteurs de l’insertion (missions locales, Cap Emploi, etc.). Outre les agences d’intérim, les entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) occupent une place à part entière dans le marché de l’emploi, en combinant activité économique et accompagnement social renforcé. En 2024, 56 420 personnes ont suivi un parcours d’insertion via une ETTI[1]. Conventionnées par l’État dans le cadre de l’insertion par l’activité économique (IAE), ces structures s’adressent à des publics très éloignés de l’emploi (bénéficiaires du RSA, jeunes sans qualification, chômeurs de longue durée…) en combinant l’acquisition d’expériences professionnelles au travers des missions d’intérim et un accompagnement socioprofessionnel renforcé. À la différence des agences classiques, les ETTI s’inscrivent avec succès dans une logique de parcours vers l’emploi durable, avec pour objectif une insertion réelle et pérenne : Partant du projet professionnel de la personne accompagnée, elles alternent missions en entreprise, formation et suivi individualisé, afin de renforcer l’employabilité et ont démontré une réelle efficacité : avec plus de 60% de sorties positives, le taux d’accès à l’emploi approche 50%, dont une fois sur deux en emploi durable[2], soit des résultats supérieurs aux formules classiques d’emplois aidés, pour un coût inférieur à celui des autres structures d’IAE et alors que les bénéficiaires pris en charge par les ETTI sont en situation plus difficile[3].

Enfin, la convention vise à développer les compétences à travers des parcours de formation et de reconversion adaptés, pour combler les écarts entre les compétences détenues par les candidats et celles requises par les entreprises, et ainsi favoriser un retour rapide et durable à l’emploi.

Cette coopération vient renforcer une réalité de terrain : historiquement centrées sur la réponse immédiate aux besoins de main-d’œuvre, les ETT se placent désormais comme opérateurs essentiels de l’accompagnement à l’évolution des parcours professionnel en proposant des services intégrés, incluant formation, immersion en entreprise et en développant des parcours d’insertion qualifiants qui complètent l’action des opérateurs publics. Ce rôle élargi fait des agences d’emploi un levier majeur d’accélération des parcours vers l’emploi durable. Cette complémentarité s’appuie sur les atouts respectifs de chaque acteur : les agences d’intérim, dotées d’une connaissance fine et souvent en temps réel des besoins des employeurs et du bassin d’emploi, sont en mesure de proposer rapidement des missions adaptées, tandis que France Travail mobilise un large vivier de candidats et apporte son expertise et ses moyens en matière d’accompagnement socio-professionnel, d’orientation et de formation. Enfin, la coopération entre France Travail et les agences d’intérim s’appuie de plus en plus sur des expérimentations technologiques fondées sur le partage des données et l’intelligence artificielle. A titre illustratif, l’expérimentation en cours de partage des informations entre les deux réseaux doit permettre de favoriser la diffusion des offres d’emploi des ETT aux demandeurs d’emploi répondant aux compétences attendues. Ces chantiers de transformation importants d’interopérabilité des systèmes ouvrent des perspectives tout à fait intéressantes pour gagner en efficacité dans la mise en relation entre employeurs et demandeurs d’emploi et ainsi améliorer concrètement la fluidité du marché du travail.

 

-> à Ce dossier donne la parole à plusieurs acteurs-clés de ce partenariat : des groupes d’intérim – Actual, Adecco, Adéquat–, et à l’opérateur public FranceTravail. À travers ces entretiens, nous souhaitons mettre en lumière les complémentarités, les réussites concrètes et les axes de développement de cette coopération, afin de contribuer à une réflexion collective sur le retour à l’emploi dans un écosystème agile et coordonné.

->  Lien vers le magazine du CRAPS (dossier p. 102-122) : https://www.thinktankcraps.fr/wp-content/uploads/2025/07/MAgazine-juillet-2025-web-3007-15h00.pdf

 

[1]Xerfi(2024). Le marché de l’intérim en France.

[2]Poncelet, J. (2024). Chiffres clés 2024 des entreprises d’intérim. La fédération des entreprises d’insertion.

[3]BLASCO, Julien (2024) « Quelle situation professionnelle après un par coursen insertion par l’activité économique ? » Dares Analyses n°9.

[4]FARGES Audrey, Raphaël FROGER (2023) « Comment l’insertion en emploi six mois après un contrat aidé non marchand évolue-t-elle depuis 2015 ? »Dares Analyses n°11.

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